L’éradication des passoires thermiques, un nouveau défi pour l’immobilier locatif

L’interdiction de mettre en location des passoires thermiques est-elle une « folie », comme l’a asséné l’ancien premier ministre Edouard Philippe dans un portrait publié par l’hebdomadaire Le Point en janvier ? Le maire du Havre y dénonce cette mesure de la loi Climat et résilience, en vigueur depuis le 1er janvier pour les habitations les plus mal isolées et énergivores.

L’édile prédit une réduction du « nombre de logements mis à la disposition des gens, et en général les plus fragiles » et confie que « la crise qui vient en matière de logement doit beaucoup inquiéter le gouvernement ». « Personne n’est fou, lui a répondu dans L’Obs Olivier Klein, ministre délégué chargé du logement. Ce qui est une folie, c’est de laisser les gens vivre dans des passoires thermiques. »

Au-delà des grands mots, un constat : le marché immobilier réagit. Il se crispe. La loi n’interdit pourtant à ce stade que la location des pires « passoires », classées G + (140 000 biens loués par des particuliers sont aujourd’hui concernés). Les effets les plus puissants sont attendus à partir de 2025, lorsque la contrainte s’exercera sur tous les biens classés G. Suivront les F en 2028, et les E en 2034. La mesure touchera alors plus de 43 % du parc locatif privé. Elle vient forcer la main des propriétaires bailleurs, qui n’avaient jusqu’à présent aucun intérêt à rénover leurs biens, n’étant pas les bénéficiaires de la baisse des factures d’électricité ou de gaz.

Des travaux efficaces mais coûteux

Des propriétaires de passoires thermiques font leurs calculs. Ils anticipent une décote de leur bien immobilier, présupposent qu’elle ira crescendo, et nombre d’entre eux décident de vendre, plutôt que d’engager des travaux. « Beaucoup de petites surfaces sont vendues, constate Elodie Frémont, porte-parole des notaires du Grand Paris. Par exemple, un client de mon étude en aurait eu pour 12 000 euros de travaux pour faire passer son studio de 12 mètres carrés d’une étiquette de performance énergétique F à D, alors qu’en vendant sa décote n’a été que de 8 000 euros. »

Lire le décryptage : Neuf idées reçues sur la rénovation énergétique des bâtiments

Les propriétaires bailleurs peuvent certes bénéficier d’aides publiques pour la rénovation. Mais, en pratique, des obstacles demeurent, qu’il s’agisse de la complexité de la plate-forme 100 % en ligne MaPrimeRénov’, chargée de distribuer ces subventions, ou de la difficulté à obtenir le feu vert de la copropriété pour réaliser des travaux efficaces mais coûteux, comme l’isolation de la façade ou de la toiture.

Le ressenti « terrain » des notaires a été confirmé par une enquête publiée mercredi 1er février par le site de petites annonces SeLoger. Les biens étiquetés F ou G, pour consommation énergétique excessive, mis en vente sur la plate-forme, ont presque doublé entre 2020 et 2022. Le volume d’annonces de location « passoires énergétiques » a, lui, reculé de 40 % en un an.

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